« Une sorcière. C’est comme ça que ça s’appelle. C’était comme ça qu’on les appelait. Les guérisseuses, les thérapeutes, les mystiques. Toutes celles qui cherchaient la vérité. Et même les femmes ordinaires qui voulaient juste la dire »
Isabelle Sorente, Le complexe de la sorcière
Juste un café aux épices, un café chaussette, c’est-à-dire fait directement dans une casserole, ne pas prendre le temps de déjeuner, juste un café, un kaki, un peu de fromage, du raisin, le dernier raisin muscat de la saison, prendre le temps de regarder la rose, dans sorcière il y a rose, juste un café, un peu de chocolat, rentrer, jeter ma veste sur le lit, caresser Lumière dans un rayon de soleil, lui dire que je l’aime, qu’elle est belle, ne pas prendre le temps de ranger les courses, ouvrir l’ordinateur, remettre la wifi, ouvrir la fenêtre pour laisser rentrer le rayon de soleil, faire le café dans la casserole rouge, m’asseoir, admirer la rose, la respirer car c’est une rose qui sent, juste un café dans une tasse multicolore, manger la croûte du fromage, garder l’accent circonflexe de croûte, même si cela va aussi sans, écrire les mains froides, repenser à la discussion dans la rue juste avant d’arriver, avoir peur pour Marie – il lui est arrivé quelque chose de grave mais elle ne veut pas que Bruno m’en parle – être vulnérable, sentir l’urgence d’écrire, sentir le désir d’un café, juste un café chaussette aux épices, gingembre, cardamome, curcuma, poivre, muscade, anis étoilé, commencer à écrire, choisir la police, la taille, la couleur, écrire, taper sur des touches, voir les mots se former, faire des fautes, inverser les lettres, corriger sans laisser de rature, entendre l’ascenseur, les voisins qui rentrent et qui vont préparer le déjeuner du dimanche, juste un café et écrire, réchauffer le café, le rallonger, penser à demain, à mes élèves, boire le café, ressentir la chaleur des gens qui m’invitent en Creuse, le 10 novembre, pour faire mon spectacle, des comédiens, me faire du souci pour Marie, mon spectacle s’appelle « Le chant du désir », j’ai peur, j’ai envie, j’ai envie, j’ai peur, être cette femme ombre et lumière, écrire, être en état de création, sentir que le désir m’anime, un élan qui me donne la force d’écrire.
Mon prochain spectacle parlera de la création et de ce qui nous empêche de créer.
Faille(s) ou le chant du clair-obscur.