«L’insignifiance et la futilité qui règnent en maîtres barrent l’accès au réel et à la profondeur. Aussi ai-je gagné la certitude que les catastrophes ne sont là que pour éviter le pire.
Et y a-t’il pire que d’avoir traversé la vie sans houle et sans naufrage, d’être resté à la surface des choses, d’avoir dansé toute une vie au bal des ombres ? »Christane Singer, Du bon usage des crises

Il m’arrive fréquemment d’être fatiguée d’être moi-même. Quand j’étais petite, maman me disait « Tu me fatigues ! », parce que je chantais et dansais sans cesse, avec toute l’énergie d’une petite fille très vivante.
Aujourd’hui, maman n’est plus là pour me le dire, mais, oui, je me le dis à moi-même. Peut-être pas pour les mêmes raisons, j’ai appris à prendre moins de place puisque mon élan vital semblait déranger, mais bien parce que je n’ai guère de repos en ma compagnie.
Des hauts des bas, le chaos, les larmes, le désespoir puis un débordement de joie, le mal de vivre, l’émerveillement devant un chien, le rire au téléphone, les sanglots dans mon lit, les jours de ténèbres, les jours bénis…
Aujourd’hui je suis à St Malo. Une journée difficile, de pensées douloureuses, de « à quoi bon », de fatigue, de perte de sens ; je pensais ne plus jamais en sortir.
Je suis allée au Grand Hôtel des Thermes me baigner dans un bassin avec des jets, des pluies, des bouillonnements… ensuite je suis allée au hammam, j’adore la chaleur humide, j’y suis restée longtemps, espérant qu’en me liquéfiant j’allais retrouver un peu de sérénité. Rien du tout ! Je suis ressortie avec la même tristesse, la même lourdeur.
Je me suis effondrée sur mon lit, résignée à attendre l’heure du dîner avec un livre parlant de l’effondrement de notre civilisation !
Et puis, et puis… la mer m’a appelée et sa voix était plus forte que la mienne : « Viens, viens te baigner, trouve l’énergie et viens ! ». J’ai remis mon maillot mouillé, j’ai enfilé un pull et un short et j’y suis allée ! La marée montait, le vent était du nord, le ciel nuageux, mais la mer continuait de m’appeler.
Alors j’ai jeté mes quelques affaires sur la plage et je suis entrée dans l’eau qui m’avait invitée, qui m’avait désirée.
C’est là que la vie a repris le dessus, très simplement, sans que je me dise quoi que ce soit.
J’avais répondu à l’appel et mon corps chantait et dansait dans les vagues !